Un patient consulte les urgences pour des brûlures de l’avant-bras suite à un retour de flamme provoqué par l’embrasement d’un récipient d’essence qui s’est renversé, alors qu’il travaillait.
Il s’agit de brûlures du 2ème degré superficielles, qui se caractérisent par la présence de phlyctènes, avec une peau humide et rosée en-dessous et d’importantes douleurs. La brûlure du 2ème degré franchit l’épiderme et pénètre partiellement dans le derme.
La phlyctène est le résultat de changements inflammatoires précoces par lesquels l’augmentation de la perméabilité capillaire entraîne la formation d’une vésicule liquidienne entre le derme et l’épiderme. La pathogenèse de la formation de la phlyctène est compliquée et contradictoire. Le liquide que contient la phlyctène aurait à la fois des effets bénéfiques et délétères.
Lors de la prise en charge aux urgences, la question des phlyctènes est donc souvent débattue : faut-il les laisser intactes, aspirer leur contenu, ou les débrider complètement ?
Pour certain•es, les phlyctènes intactes forment une barrière naturelle, qui protège de l’invasion par les micro-organismes et crée un environnement humide qui stimule l’angiogenèse, aide à la ré-épithélialisation et accélère la guérison de la brûlure.
Pour d’autres, les phlyctènes doivent être vidées de leur contenu par aspiration, tout en conservant leur toit, qui constitue un pansement biologique naturel. Toutefois, en effectuant ce geste, il faut noter une augmentation du risque de colonisation bactérienne. L’identification de la profondeur de la brûlure ne se fait alors qu’après quelques jours, en ôtant le toit de la phlyctène.
Enfin, les arguments en faveur du débridement des phlyctènes reposent sur le fait que certains composants du liquide et médiateurs inflammatoires auraient un effet délétère sur la guérison des brûlures (vasoconstriction, effet immunosuppresseur, accroissement de la phlyctène et pression sur le tissu sous-jacent…). Le débridement immédiat permet une visualisation directe du lit de la brûlure, qui va guider son traitement et son suivi.
Le traitement des phlyctènes reste donc un sujet controversé. On retrouve quelques recommandations de pratique, avec peu d’évidences scientifiques :
- Débrider avec des ciseaux stériles les phlyctènes rompues et les peaux lâches, jusqu’au bord de l’épiderme viable.
- Laisser les petites phlyctènes intactes pendant 3 – 4 jours (peu de risque de rupture spontanée ou d’endommagement des tissus sous-jacents).
- Les grandes phlyctènes, à parois fines de surcroît, ou les phlyctènes sous tension devraient être débridées ou aspirées en raison du risque de rupture spontanée, d’autant plus si elles gênent la mobilité et provoquent un inconfort. Ces phlyctènes se percent ou s’aspirent avec une aiguille stérile, en gardant le toit de la phlyctène comme pansement biologique durant 3 – 4 jours.
Chez notre patient, nous avons opté pour un débridement complet des phlyctènes en raison de la rupture spontanée et du décollement visible, et recouvert les brûlures par une crème à base d’acide hyaluronique et de sulfadiazine d’argent et un pansement épais et lâche, afin de maintenir un milieu favorable à la cicatrisation.
Images proposées par Stéphanie Dumoulin, CHVR
Références
- Greenhalgh DG. Management of Burns. N Engl J Med. 2019 Jun 13;380(24):2349 – 2359.
- ISBI Practice Guidelines Committee ; Steering Subcommittee ; Advisory Subcommittee. ISBI Practice Guidelines for Burn Care. Burns. 2016 Aug;42(5):953‑1021.
- Flanagan M, Graham J. Should burn blisters be left intact or debrided ? J Wound Care. 2001 Feb;10(2):41 – 5.